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Le contrat de partenariat du stade de Bordeaux mis sur la touche par le Conseil d’État

Civil - Immobilier
27/05/2016
Jugeant irrégulière la conclusion du contrat de partenariat du nouveau stade de Bordeaux (aujourd’hui stade Matmut Atlantique), le Conseil d’État a annulé la délibération du conseil municipal approuvant les termes du projet de contrat et autorisant sa signature. La commune a quatre mois pour régulariser.
Coup d’envoi du PPP. En mai 2010, la commune de Bordeaux décide de recourir à un contrat de partenariat et à la mise en œuvre d’une procédure de dialogue compétitif en vue de l’attribution, à un opérateur privé, d’un contrat ayant pour objet la construction, la maintenance et l’exploitation du nouveau stade girondin. La société Stade de Bordeaux Atlantique se démarque et un projet de contrat de partenariat est établi. Par une délibération d’octobre 2011, les termes du projet sont approuvés et le maire est autorisé à signer le contrat. Arguant de l’irrégularité de la délibération, un conseiller municipal en demande l’annulation devant le Tribunal administratif de Bordeaux. Sa demande est rejetée en première instance (TA Bordeaux, 19 déc. 2012, n° 1105078) puis en appel (CA Bordeaux, 17 juin 2014, n° 13BX00563). Un pourvoi est formé.

Carton rouge pour la cour d’appel. Le Conseil d’État rappelle que l’information sur le coût prévisionnel du contrat porte sur le « coût prévisionnel global du contrat, en moyenne annuelle », et sur la « part que ce coût représente par rapport à la capacité de financement annuelle » de la commune (CGCT, art. L. 1414-10). Ce coût se mesure par le ratio : coût moyen annuel du contrat/recettes réelles de fonctionnement (CGCT, art. D. 1414-4). Or, en l’espèce, le Conseil d’État juge que l’information sur le coût prévisionnel global figurant en annexe de la délibération attaquée était insuffisante en ce qu’elle n’incluait pas une « subvention » de 17 millions d’euros versée par la commune à titre d’avance sur rémunération, ainsi que la refacturation de 2,6 millions au titre d’impôts et taxes payés par le titulaire du contrat (soit une omission de près de 20 millions d’euros). Les juges du fond avaient estimé que ces sommes, versées en cours d’exécution du contrat, n’avaient pas à être intégrées dans le calcul dans la mesure où elles ne sont pas liées aux prestations du titulaire ni préfinancées par lui.

Arrêt de jeu pour la commune. Le Conseil d’État censure ce raisonnement et juge que « cette omission caractérise une insuffisance d’information des membres du conseil municipal sur les conséquences financières du recours à un contrat de partenariat [et] a privé effectivement les membres du conseil municipal de la garantie octroyée » par l’article L. 1414-10 précité. La délibération approuvant les termes du contrat et autorisant la signature du contrat est donc annulée.

Temps additionnel pour le contrat. L’illégalité en cause affecte les conditions dans lesquelles le conseil municipal a donné son autorisation à la conclusion du contrat. Elle constitue donc un vice grave qui aurait dû, en principe, se solder par la résiliation. Le Conseil considère, toutefois, que cette irrégularité peut être régularisée par l’adoption d’une nouvelle délibération présentant une information complète sur le coût prévisionnel global du contrat. Le Conseil d’État enjoint donc la commune de résilier le contrat dans un délai de 4 mois, délai pendant lequel elle pourra régulariser la signature du contrat par une nouvelle délibération.

Ouverture. Jusqu’à l’ordonnance du 23 juillet 2015 et à son décret d’application du 25 mars 2016, l’information relative au coût prévisionnel global devait être fournie préalablement à la décision de signer le contrat. Depuis l’entrée en vigueur de la réforme, l’estimation de ce coût doit désormais figurer dans l’« étude de soutenabilité budgétaire » (prévue par Ord. n° 2015-899, 23 juill. 2015, art. 74, JO 24 juill. ; voir pour son contenu, D. n° 2016-360, 25 mars 2016, art. 148, JO 27 mars), préalable à la procédure de passation (D. n° 2016-360, 25 mars 2016, art. 24, II, 2°, b). L’information sur le coût du contrat projeté devra donc être communiquée préalablement à la décision de recourir au marché de partenariat et non plus, comme c’était le cas en l’espèce, préalablement à la décision de signer le contrat.
Source : Actualités du droit